dimanche 7 novembre 2010

Le phénomène César Millan

L’accès à l’information est désormais illimitée grâce aux télécommunications. Ce matin, vous ne vous sentez pas très bien alors vous ouvrez l’ordinateur de la maison, tapez une liste de symptômes sur Google qui vous pond aussitôt un diagnostique. Vous vous rendez à l’hôpital avec une copie imprimée des informations que vous avez trouvé. Une fois dans le bureau du médecin, vous exigez certains tests après avoir pris soins de poser vous-même un diagnostique. Exaspéré, le médecin vous les prescrit et lorsque les résultats confirment que vous vous étiez trompé, vous exigez un autre médecin, plus compétent s’il vous plait. Google ne peut pas se tromper.

Bien que la situation exposée précédemment soit exagérée, c’est sensiblement ce qui est entrain de se produire ave le phénomène César. J’ai un chien d’un peu plus de 75 livres n’a jamais connu d’altercation avec ses semblables, se laisse maltraiter par le vieux matou grincheux de la maison sans riposter, m’accompagne régulièrement au travail au grand plaisir des clients qui le trouve si adorable et qui branle la queue lorsque son vétérinaire le vaccine. Je m’avancerais même à dire que j’ai une certaine complicité avec cette bestiole qui couche sa tête sur mes genoux quand je pleure, qui m’accueille quand je rentre à la maison, avec qui je joue. Alors pourquoi est-ce que, lorsque je suis chez moi, mes invités me reprochent de le laisser monter sur MON divan car la relation hiérarchique pourrait être compromise? Pourquoi est-ce que je devrais manger en premier et lui imposer le parfum de la cuisson alors qu’il n’a pas mangé depuis 10 heures? Ah, oui, j’oubliais... Parce que c’est ce que dit César!

L’endroit le plus incroyable pour subir ces commentaires est, sans contredit, l’air d’exercice pour chiens. Depuis que l’émission de César est portée à l’écran, j’ai cessé de les fréquenter : « je ne veux pas me mêler de ce qui ne me regarde pas, mais César dit que vous ne devriez pas… » et à ce moment je me tourne et m’en vais. C’est une vingtaine de nouveaux spécialistes formés scientifiquement devant la téléréalité à raison d’une heure semaine qui prêchent la bonne nouvelle. Ils ont désormais une opinion sur tout. Et même s’il s’agit d’un problème de santé, leur chien a déjà eu ce problème et ils ont sauvé au moins 1 000$ de frais vétérinaires en faisant [bla… bla… bla…] Après tout, les vétérinaires ne sont que des spécialistes en extorquassions qui jouent sans remords avec les sentiments des propriétaires d’animaux domestiques. Ils n’ont pas réellement guérit votre chien du parvovirus, ils vous ont fait croire que votre chien était malade alors qu’au fond…

Lorsque je lis « Ils [les vétérinaires] ont sûrement de bonnes intentions, mais leur spécialité, c'est le physique, pas le comportement», je ne peux poser qu’une seule question : avez-vous pris la peine de lire le communiquer à ce sujet ou votre affirmation repose-t-elle sur votre « gros bon sens »? Lorsqu’une affirmation repose sur trente ans d’études, qu’elle est soutenue par des médecins vétérinaires spécialistes en comportement canin ainsi que des éthologues canins, le degré de fiabilité des sources semble difficile à contester. Et si nous le comparons à l’homme qui parle au chien ayant fait « l’école de la rue » au Mexique, laquelle de ces sources semble la plus crédible?
Voilà maintenant que les tribunes discréditent les médecins vétérinaires, les taxant de jalousie envers le « dresseur », allant même jusqu’à prétendre que ces professionnels ne sont là uniquement que pour faire de l’argent. J’ai lu un commentaire sur le blog de M. Mongrain allant jusqu’à affirmer que « les vétérinaires ne connaissent rien en alimentation et en éducation des chiens. » Cette même personne poursuivait en affirmant que de consulter car un chien urine dans la maison afin d’exclure les raisons médicales de ce problème ne faisait que confirmer à quel point les vétérinaires souhaitent s’enrichir au dépend des propriétaires. Je n’aime pas l’idée de laisser un animal souffrir d’un problème urinaire simplement parce que son maître est complètement abruti par une série télé, mais c’est une opinion personnelle. Pour ce qui est de son commentaire concernant l’alimentation, je me contenterai simplement d’informer madame que les diètes vétérinaires existent depuis plus de soixante ans, qu’elles sont toujours l’objet d’une étude érudite et qu’elles ont fait leurs preuves.

Les gens achètent souvent leurs chiens selon l’apparence physique de celui-ci et non selon le caractère de la race. C’est ainsi qu’au quinzième étage d’un édifice de condos se ramasse un jack russel qui ne demande rien d’autre que de chasser les lapins. Durant les neufs heures que son maître est au travail, il est dans sa cage pour éviter qu’il ne fasse des bêtises. Lorsque le maître reviens, épuisé de sa journée, il doit rester calme et couché jusqu’à ce que ce soit l’heure de dormir où il retourne dans sa cage. On lui fait faire ses besoins sur des pads d’entrainement car c’est plus simple et, de toute façon, il est beaucoup trop petit pour aller dehors. Durant les premiers mois où le maître l’a acquis, il lui a enseigné « assis, couché, donne la patte » et depuis, on lui répète ces mêmes commandements sans plus jamais stimuler son intellect d’une quelconque façon. Il reçoit une caresse sur la tête en même temps que son repas. Deux fois par semaine, il prend une marche avec un inconnu payé pour le faire.Vers l’âge de deux ans, à bout de nerfs, les propriétaires l’apportent dans un refuge parce que les voisins ont porté plainte contre lui : trop de jappements. C’est le chien ou le condo, vous n’aviez pas le choix.

Si seulement le maître de toutou avait connu César avant, il n’en aurait pas été ainsi. Il ne faut qu’une intelligence des plus limitées pour ne pas savoir et comprendre qu’un chien a besoin d’exercice physique et de stimulation intellectuelle! A-t-on réellement besoin de grogner au dessus de son repas pour monter à son animal à quel point nous sommes alpha? Un chien ne peut-il pas être encadré, stimulé et entrainé sans pour autant être dominé? Mais qui suis-je pour affirmer cela, après tout je ne passe pas à la télévision…! A tout ceux qui raportent que César a sauvé la vie de leur chien : payez-vous donc une thérapie plutôt qu’un câblodistributeur.

samedi 6 novembre 2010

une pince au bout des bras

Aujourd’hui, j’ai tué cinq chiens et sept chats. À onze reprises, mes mains ont effectué le même mouvement : entre le pouce et l’index, sortir la seringue de son emballage, puis retirer le capuchon qui recouvre l’aiguille avant de la plonger dans un liquide jaunâtre. Avec le petit doigt, faire descendre le piston et laisser le liquide jaune monter dans le tube gradué. Poser la seringue sur le comptoir et, avec un léger mouvement vers le haut, déclencher le mécanisme de la porte retenant le gros chat roux prisonnier. Écrasé au fond de sa cage, les oreilles en arrière, il crachait et donnait des coups de pattes auxquelles un propriétaire bienveillant avait fait amputer chacune des phalanges. J’ai plongé mes bras dans la cage : la main gauche est venu le saisir au cou, juste derrière les mâchoires et la main droite l’a écrasé contre le fond glacé de sa prison. Il s’est débattu. J’ai gagné. Il avait la tête écrasée contre le comptoir tandis que je passais mon index le long de sa colonne pour trouver un muscle. J’ai enfoncé mon aiguille juste au dessus de mon doigt. J’ai laissé descendre dans son muscle mon cocktail médicamenteux en pressant le piston du pouce droit. Il se débattait pour se sauver d’une sensation de brûlure provoquée par la Kétamine. Ma main droite est revenue le chercher à la base du cou et d’une seule main je l’ai remis dans sa cage dont j’ai poussé la grille du coude gauche.

Je lui laissais cinq minutes avant de le terminer : le temps que son médicament fasse effet, le temps qu’il ne se rende plus compte que j’allais lui injecter un barbiturique dans les veines pour faire arrêter son cœur de battre. Cinq minutes pour qu’il ne réalise plus qu’il pourrait m’expédier à l’hôpital en choc septique, les mains suintantes de bactéries buccales tentant inutilement de survivre à une histoire signée et payée à la réception il y a plusieurs minutes. Cinq minutes pour qu’il ne réalise jamais ce qui nous différencie, lui terrorisé au fond de sa cage et moi, blasée de mon travail comme un nazis à l’entrée d’une chambre à gaz : moi, j’ai des mains qui peuvent servire de pince lorsque j’approche le pouce et l’index l’un de l’autre.

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C'est ce qui passe dans la tête des gens lorsqu'ils tuent les animaux que vous aportez dans des cliniques et que vous refusez d'assister a leurs morts, trop sensibles que vous êtes pour être confortables avec vos consciences d'euthanasier des animaux en parfaite santée parce que vous déménagez.

Si ce que j'écris sur mon Facebook se ramsse dans le bureau de mes boss, j'ose au moins espérer que je peux envoyer se faire foutre qui je veux sur mon blog! Mon blog anonyme, précisons-le!